Le Blog de Gégé

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13/10/2022

Centrionale Saintes-Maries-de-la-Mer – Étape 4

Étape 4 – Le Bleymard (48) / Lunel (34) 149 km – 1748 m

Même si je dois heurter les pudiques, je vais me lâcher en vous contant aujourd’hui l’expérience de la jouissance « cyclorgasmique » telle que je l’ai vécue ce matin. Après tout, il n’est jamais trop tard pour connaître ce genre d’extase plutôt que de toujours l’ignorer ; et même si la « chose » n’est pas systématiquement reproductible, il me semble qu’elle mérite d’être évoquée.

Le sens que recouvre ce néologisme dont vous ne trouverez pas trace, même dans les ouvrages les plus savants pourra être compris si vous avez la patience de lire le témoignage relatant les sensations ressenties au cours des différents paliers franchis pour accéder à ce nirvana.

Ça commence par un « titillage » nocturne des gambettes sur les pentes raides du col du Finiels. Le temps de chauffe et de mise en condition pour gravir les presque 500 mètres du col, varient selon l’âge, la forme et l’aptitude de l’individu pour ce genre d’exercice. 

Comme il s’agit d’atteindre ensemble ce sommet et profiter de ces brefs instants pendant lesquels dure l’aurore, nous devons accorder nos violons et doser nos efforts. 

Au moment précis où l’aube point, nous arrivons au sommet du Finiels. Là-haut, la route s’installe pour quelques kilomètres sur le plateau en pente douce du le mont Lozère, où nous devons encore pédaler un peu. Elle nous permet de découvrir les chaînons de montagne se découpant dans les lointains en plans successifs tandis que le ciel s’habille de rougeoiements changeants.

L’instant est magique. Isolé ainsi sur un des points culminants du Massif Central, j’ai le sentiment d’être privilégié en assistant à ce spectacle, si rare à mes yeux, bien qu’il se renouvelle chaque matin depuis que le monde existe. 

C’est le début de cet épisode qualifié de « cyclorgasmique ».

Comble de bonheur, après avoir déjà découvert avec ravissement ce sixième ciel flamboyant, alors que j’entame la descente, j’ai paradoxalement la sensation d’atteindre un niveau encore plus élevé de l’extase.

Au moment où les premiers rayons qui percent les nuages illuminent les crêtes de massifs pierreux émergeant de nappes de brouillard semblables à des lacs, tandis que la route déroule ses virages dans un paysage de rocailles et de landes, me voila transporté cette fois au fameux septième ciel.

Je ne tarde pas à atteindre le huitième dont j’ignorais l’existence jusqu’à ce jour. J’y accède à tombeau ouvert en dévalant les pentes vers le hameau de Finiels. L’explosion finale se produit tandis que je me délecte de toute la palette des couleurs de l’automne habillant les arbres, qui marque le fond de petits vallons. Je sens bientôt couler des larmes sans savoir si elles sont une conséquence de ces sensations intenses ou celui de l’air vif caressant mes joues.

Lorsque je débarque dans le petit café du Pont-de-Montvert, je ne peux réprimer l’envie de partager cet émoi avec la patronne du bar.

Comme pour me signifier qu’elle a compris la nature de mon trouble, elle me glisse avec malice : – « Croyez-vous que nous vivons ici par hasard ? ».

Quant au reste de cette journée si agréablement commencée, elle continue de la même manière entre montées sévères découvrant des paysages grandioses, bientôt suivies de pentes vertigineuses où je me laisse aller au plaisir de la vitesse. Entre ces montagnes russes, nous goûtons parfois à quelques roulades tranquilles au milieu des forêts de châtaigniers tapissant par endroits la route de bogues.

En toute chose, le plaisir ne dure pas. Après avoir dépassé les derniers villages de camisards, à partir d’Anduze et jusqu’à Lunel, nous retrouvons la plaine et la fureur automobile.

Pourtant, cette journée, j’en ai la certitude, comptera parmi mes plus beaux souvenirs de randonnée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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