Randonner dans le Morvan au lever du jour est presque l’assurance de vivre un moment de bonheur. Certes, c’est un plaisir qui oblige à appuyer sur les pédales, mais c’est aussi un grand moment de sérénité tant il est rare de goûter à pareil silence.
Progresser sur ces routes aux sinuosités harmonieuses et découvrir à chaque virage une nouvelle vue sur cette campagne de douces collines aux reliefs soulignés par des haies, voilà une bonne raison d’écourter sa nuit.
La lumière d’un soleil voilé fait luire les prairies mouillées de rosée où paissent les troupeaux de charolais. Dans les lointains des traces de brouillard flottent au dessus d’étangs, de mares ou de ruisseaux à truites.
Pendant la tranquille ascension du petit col de Rebout, où se niche en pleine forêt le musée de Bibracte, (lieu supposé de la capitale des éduens), j’envisage une possible réincarnation en taureau reproducteur Charolais. J’imagine leur vie paisible partagée entre brouter l’herbe grasse des pâtures et la contemplation des collines environnantes, en attendant d’être choyé, étrillé, exhibé, admiré et avec de temps à autre la mission qui leur vaut autant d’attentions…
Mais dans la descente, je réalise que fatalement viendra le jour où l’inaptitude à la mission première condamnera l’heureux animal à la boucherie. Non, finalement, mieux vaut ne pas être réincarné en taureau !
Au-delà de St Léger sous Beuvray, les reliefs s’adoucissent et la descente continue me porte presque sans effort jusqu’à Autun.
Un peu avant Épinac, je croise un couple âgé de cyclotouristes qui avouent être passés depuis cette année à l’assistance électrique. Je les encourage, car malgré le poids des ans, ils ont toujours envie de bouger et c’est finalement l’essentiel.
D’Épinac à Bligny sur Ouche je suis en terrain connu, sur les routes de deux diagonales et de parcours de vacances.
Pour s’extraire de la vallée de l’Ouche, les morceaux de choix se succèdent. Pendant un long moment, le GPS annonce une pente à 2 chiffres avec quelques pointes à 13%. Patience et petits braquets finissent par venir à bout de ces raidards.
Arrivé dans les premières vignes, il ne reste plus qu’à se laisser glisser pour dévaler un peu plus de 300 mètres de dénivelé, vers Nuits Saint Georges.
Sacrilège en terroir bourguignon, je me récompense avec une bonne bière ambrée en prétextant qu’un cyliste se doit d’être sobre ! J’ignore si la serveuse m’a cru.