GIENS (83) – En selle pour la route du sel
Trajet : Cosne-d'Allier (03) - Giens (83)
Départements traversés :
07 - Ardèche
18 - Cher
26 - Drôme
42 - Loire
43 - Haute Loire
63 - Puy de Dôme
83 - Var
84 - Vaucluse
Participant(s) :
GAUTHIER Gérard
Dates : Du 09/05/2022 au 13/05/2022
Dénivelée : 8765 m
Distance : 746 km
Étapes | |||
1 | Cosne-d'Allier (03) - Saint-Pourçain-sur-Sioule (03) | 144 km | 1663 m |
2 | Saint-Pourçain-sur-Sioule (03) - Arlanc (63) | 145 km | 2083 m |
3 | Arlanc (63) - Privas (07) | 157 km | 2392 m |
4 | Privas (07) - Cadenet (84) | 163 km | 1683 m |
5 | Cadenet (84) - Hyères (83) | 137 km | 944 m |
Ce récit est une compilation adaptée de plusieurs articles publiés sur mon blog au cours de notre randonnée vers la presqu’île de Giens.
Cette Centrionale a été précédée par un prologue d’une quarantaine de kilomètres avant le départ officiel de Saint-Amand-Montrond. Ce choix d’organisation nous a permis faire étape le premier soir à Saint-Pourçain-sur-Sioule chez Michel et Jacqueline afin de limiter les frais d’hébergement. Il a facilité le découpage des étapes suivantes.
1° étape : Cosne-sur-Allier (03) / St-Amand-Montrond / St-Pourçain-sur-Sioule – 149 km /1665 m
Lorsque j’ai présenté notre projet de Centrionale vers la presqu’île de Giens sur les réseaux sociaux, j’ai omis d’évoquer le Bourbonnais. Cette très belle région, cadre de notre première étape, mérite au moins autant que les autres d’être citée. La veille déjà, j’ai pu apprécier cette campagne de bocage, en cheminant de Moulins jusqu’à Saint Pourçain pour rejoindre la maison où mon compagnon de route et de son amie m’attendaient.
Dimanche soir, nous procédons aux deniers préparatifs, rassurés par la météo plutôt favorable annoncée pour toute la durée de notre randonnée vers les rivages de la Méditerranée.
Lundi, alors que l’aurore pointe à peine, Michel met sa compagne à contribution. Jacqueline, sa plus fervente supportrice et cycliste assidue, nous transporte avec armes et bagages jusqu’à Cosne-d’Allier. Ce prologue d’une quarantaine de kilomètres nous permet de nous mettre en jambes pour rallier notre point de départ officiel, Saint-Amand-Montrond.
Ce début de parcours sur l’habituel terrain de jeux de mon compagnon de route me donne une seconde fois l’opportunité de découvrir la beauté des collines du bocage bourbonnais tapissées par les nappes de brumes matinales. Après ce premier épisode vallonné, suivi d’une long faux plat descendant, nous pénétrons dans la forêt de Tronçais. Elle a été développée par Colbert à l’époque où pour se constituer une marine de guerre puissante, il fallait d’abord disposer d’importants volumes de chênes. Mais, le temps des navires en bois et de la marine à voile est révolu.
Les zones de coupes, où subsistent quelques baliveaux destinés à faciliter la régénération de la forêt, témoignent que ces chênes séculaires sont aujourd’hui toujours aussi prisés, mais cette fois l’usage sera pacifique. Beaucoup des arbres abattus serviront à reconstituer une forêt très géométrique, celle de la nouvelle charpente de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Après le traditionnel pointage de départ à Saint-Amand-Montrond, nous cheminons par la paisible vallée de l’Aumance jusqu’à atteindre Hérisson, petite cité endormie au pied des ruines d’un château imposant. Aucun commerce n’est ouvert, aussi avant de pouvoir nous restaurer dans l’unique auberge de Villefranche d’Allier, distante de près de 20 km, nous devons avaler encore quelques côtes sévères dont deux belles « patates » en guise d’apéritif. Voyager dans le désert français implique souvent de payer de sa personne !
Pendant toute cette journée bosselée à souhait, nous goûtons au plaisir du toboggan bourbonnais, avec pour seuls spectateurs les troupeaux de bovidés toujours aussi intéressés par les cyclo-randonneurs.
Demain, une journée encore plus relevée nous attend. Nous devrons avaler cette fois un peu plus de 2200 m de dénivelée positive avant de pouvoir nous poser dans la cuvette d’Ambert entre Livradois et Forez.
2° étape – Saint Pourçain-sur-Sioule (03) / Arlanc (63) – 152 km – 2224 m
Notre parcours du jour débute vers 5h 30. Nous cheminons sur des routes faciles jusqu’au premier pointage à Ebreuil (03) à une quarantaine de km de notre point de départ. Puis, pendant près de deux heures, nous devons emprunter des routes sans grand intérêt pour contourner par l’Est puis par le Sud l’agglomération Clermontoise, dominée par la silhouette caractéristique du Puy de Dôme. Dans les lointains quelques rares névés subsistent sur ce que je pense être la chaîne du Sancy.
Après Lezoux, nous quittons enfin ces routes de la grande couronne de la capitale du pneu et pénétrons pour de bon dans la campagne auvergnate tapissée de genêts et de fleurs.
Une bosse pour achever de nous mettre en appétit, puis nous nous posons à Bongheat (63) pour la pause méridienne, satisfaits d’avoir négocié les deux-tiers de la distance du jour.
Le temps d’un café, à Saint-Dier-d’Auvergne, nous échangeons avec des clients. Ils nous questionnent sur notre itinéraire. La description du parcours qui nous attend ne laisse pas de place au doute : ça va grimper dur ! Une lecture plus attentive de la feuille de route et la consultation du profil confirment leurs dires, il nous reste un peu plus de 1100 mètres à gravir sur le dernier tiers du parcours, dont près de 700 mètres d’ascension continue.
Nous gérons tant bien que mal notre effort, d’autant plus important que la chaleur s’ajoute à la difficulté du parcours.
Mon compagnon de route n’en finit pas de m’étonner ; certes il peine, mais je suis bien placé pour savoir que son acolyte n’est guère mieux. Les 75 printemps de Michel ne l’empêchent jamais d’avancer. Une fois de plus, je constate à quel point la volonté peut suppléer la moins bonne condition physique inéluctable liée à l’âge.
Au fil des ascensions répétées, la fatigue accentuée par la chaleur ambiante nous gagne, mais jamais elle ne nous empêche de nous délecter de ces paysages toujours changeants. Même les 19 kilomètres ininterrompus de la plus longue de toutes, grignotés à force d’obstination, ne parviennent pas à nous priver du plaisir de la contemplation. Pédaler est parfois dur, mais souvent plus la difficulté croît, plus on gagne en beauté !
Fourbus, nous dévalons vers Arlanc par la très belle vallée de la Dolore, mais pour que la pause finale au bar soit pleinement méritée, nous devons affronter une dernière courte, mais redoutable, montée. La bière, heureusement de bonne provenance, en devient encore plus savoureuse.
3° étape – Arlanc (63) / Privas ( 07) 157 km – 2392 m – 4° étape – Privas ( 07) / Cadenet (84) 163 km – 1683 m
Arrivés assez tard hier soir à Privas, plutôt fatigués, les problèmes d’intendance ne nous ont guère laissé de loisirs. Aussi, j’ai préféré dormir, vous épargnant ainsi le déversement de cette prose quotidienne. Parfois, le repos est bénéfique à tous !
Pour résumer succinctement ces deux dernières journées, je dirais que le plaisir de la randonnée a été proportionnel à l’effort fourni.
Selon ce critère, en considérant l’énergie dépensée pour mener cette étape à son terme, celle du mercredi, entre Forez et pays cévenol nous a procuré un plaisir exceptionnel. Certaines petites routes à l’écart du monde, au-delà du « Village des justes » du Chambon-sur- Lignon ont été un pur régal. Le plaisir sur ce parcours sinueux dans un paysage sauvage a d’abord été celui des yeux. Mais j’ai été aussi émerveillé en écoutant ce silence à peine troublé par le souffle léger du vent dans les arbres et la caresse des roues sur route.
L’ambiance du moment et la beauté des paysages m’ont alors inspiré l’idée de composer le « Concerto pour bicyclette ». Seule, la musique pourrait évoquer cette volupté soudaine que je devais à tout prix partager. Malheureusement, pour tout instrument, je ne joue que du dérailleur en le faisant parfois craquer et si je partage avec Beethoven le handicap d’être dur d’oreille, je suis à des années lumière de son génie. Et c’est ainsi qu’au virage suivant le » Concerto pour bicyclette » a été relégué aux oubliettes.
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L’Auvergne : ça monte
À contrario, la matinée de Jeudi dans la vallée du Rhône et dans l’approche du Contat Venaissin m’a parue dénuée d’intérêt, tout juste utile à nous porter un peu plus rapidement vers les reliefs du Lubéron, où nous avons pu renouer avec le plaisir de randonner.
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Gordes (84)
N’en déduisez pas que cette appétence revendiquée pour le relief, surtout venant d’un cyclo réputé mauvais grimpeur, soit la preuve d’un esprit masochiste. Mais, je constate que l’effort des montées à répétition offre en contrepartie la découverte de paysages sans cesse renouvelés, au fur et à mesure que la route s’élève et que se déroulent les virages.
Et puis, quand enfin vient le moment de la descente, lorsque lesté par la charge de la monture et des bagages le poids devient un atout, quand la déclivité augmente insensiblement et que tout se combine pour accroître la vitesse, tout change !
À peine après avoir basculé du sommet, la métamorphose s’opère : fini le cyclo à peine mobile, presque instable, contraint à la contemplation, place à l’équilibriste, surfant sur les sinuosités, tendu à l’extrême pour gérer sa trajectoire. Les mains sur les cocotes, parfois à la limite d’être endolories à force de tirer sur les freins, il fonce, défiant le vide en frôlant le parapet !
Enfin, ce compte-rendu serait incomplet si j’omettais la rencontre en contrebas de Vénasque (84) avec Jean-Pierre Lebras, un compagnon de route de l’UCT, en villégiature dans les environs, venu spécialement avec son épouse Evelyne, nous encourager, nous rafraichir et nous ravitailler au pied du col des Termes. Après cette rencontre, les 400 m d’ascension nous ont paru plus faciles. Merci les amis !
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Ça devient bon !
5° Étape : Cadenet (84) / Giens (83) 137 km – 944 m
Cette dernière étape est sans surprise, à l’image de cette randonnée qui se conclut sans événement notable puisque sur cette Centrionale les conditions ont été idéales, pour ne pas dire inespérées. Pour une fois les pieds nickelés n’ont pas connu les péripéties dont ils sont coutumiers : pas de cyclone, pas de casse matériel ni de martien prêts à les embarquer dans une soucoupe volante, encore que…Même le vent annoncé contraire sur les deux dernières journées a eu la bonne idée de souffler un peu plus latéralement que prévu, contribuant ainsi à nous éviter de trop pâtir de la chaleur.Nous redoutions un peu la circulation sur les routes à l’approche de la côte, mais pour une fois dans cette région où le cycliste est souvent considéré comme un intrus, les bandes cyclables bordant généralement les routes à fort trafic, nous ont épargné l’angoisse habituelle d’un parcours en zone fortement urbanisée.Sur cette fin de parcours, à la mi-journée, l’accueil dans la boulangerie à l’entrée de Belgentier (83) nous ravit. Pour nous remercier de compliments justifiés à propos de l’amabilité de la vendeuse Gégé et sur la qualité de ses pâtisseries, Géraldine nous offre un excellent café sur la terrasse attenante au magasin.Au retour vers Hyères par la route du sel, après l’ultime pointage d’arrivée dans la presqu’île de Giens, il s’en manque de peu que mon vélo reparte par la voie des airs, emporté par la voile d’un kite-surfeur maitrisant mal son matériel. En voyant le casque bleu et son étrange tenue, le doute m’assaille, ne serait-ce pas un martien déguisé en kite-surfer ?
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Le long de la route du sel
Le bilan de cette neuvième Centrionale partagée entre de superbes routes désertes dans la traversée du Massif Central, du Lubéron et d’autres nettement moins plaisantes dans la vallée du Rhône et dans l’est des Bouches du Rhône s’établit à 758 km pour 8908 m de dénivelé positive (Distance allongée par rapport à l’itinéraire tracé par le regretté Patrick Plaine)Le parcours a souvent été très exigeant notamment lorsqu’en fin de journée, il a fallu parfois gravir en continu près de 500 mètres pour s’extraire de la vallée de l’Eyrieux avant d’atteindre Privas et près de 400 m après Bonnieux dans le Lubéron avant la très longue et belle descente vers Lourmarin dans le sud du Vaucluse.En compensation de ces efforts, cette randonnée a été un régal pour les yeux et c’est bien là l’essentiel.Pour conclure, un grand merci à ma nièce Virginie et à son compagnon Sébastien qui nous ont accueillis à Auriol (13) pour une journée de repos à la plage avec découverte (cette fois sans vélo) des impressionnantes vues depuis les calanques de Cassis.