Finalement en bidouillant, mon fils Cyril (accessoirement webmaster du site) a réussi à publier l’article relatif à notre étape Toulouse / Lamagistère. J’en profite pour le remercier pour sa contribution, à lui qui œuvre dans l’ombre et à qui je dois l’existence de ce site. Grâce à Cyril, je peux partager avec vous cette passion de la longue distance et des belles randonnées.
Vous aurez donc aujourd’hui le compte-rendu de nos deux dernières étapes fort appréciées par le primo-centrionaliste et votre serviteur.
Étape Lamagistère (82) / Brive (19)
170 km _ Dénivelé 2198 m
D’emblée, nous comprenons que la journée sera rude. Les bosses succèdent aux bosses qui inévitablement précédent des bosses suivies d’autres bosses. Mais en compensation, l’allure très modérée résultant de cette topographie pour le moins chahutée nous permet d’admirer un paysage sans cesse renouvelé et de traverser les villages du Lot et Garonne aux belles maisons de pierres blanches.
Nous franchissons le Lot à Puy -l’Evêque (46), village médiéval étagé sur un escarpement de la vallée. Ce village marque notre entrée en Quercy, contrée où je retrouve des lieux visités une première fois dans les années 1970 avec une amie du lycée qui m’accueillait dans sa famille. Souvenirs, souvenirs…
Après la pause repas à Cenac-Saint-Julien (24), nous traversons la Dordogne. D’autres souvenirs ressurgissent : celui d’un passage ici lors d’une diagonale, puis à Sarlat et Salignac-Eyvigues (24) lors d’une autre diagonale en sens inverse et à l’occasion d’un séjour du club UCT. Là encore, des bosses et toujours des bosses dont une particulièrement sévère à la sortie de Sarlat.
Les souvenirs qui m’occupaient l’esprit sont évacués d’un coup dans la montée de Nadaillac (19) lorsqu’un orage me surprend. Bernard meilleur grimpeur que moi me devance et je finis par le perdre de vue. Je vous passe les détails, malgré deux GPS aux écrans allergiques à la pluie et un autre de secours sur mon téléphone, trahi par la technique, je réussis à faire fausse route. Sous la pluie, le GPS est disposé à me donner toute sorte d’indications dont je me moque éperdument notamment la météo et mes données physiologiques. Il veut à tout prix m’informer des SMS reçus et des appels manqués, mais se refuse obstinément à m’indiquer la route. Je peste contre cette dérisoire et bien inutile sophistication qui aboutit à quelques kilomètres et 150 m de dénivelé supplémentaires sous des trombes d’eau.
Lorsque j’arrive enfin à Brive la Gaillarde, Bernard, inquiet, m’attend depuis déjà un moment. Il m’explique que privé de son téléphone, il n’a pas pu me joindre. Et pour cause… j’ai embarqué le sien lors de notre dernière pause bière !
Conclusion : Quand on a pas de tête, il faut avoir des jambes.
Étape Brive (19) / Ahun
148 km _ Dénivelé 2177 m
À l’hôtel, nous nous sommes taillés deux costumes à partir de sacs poubelles négociés auprès de la réceptionniste. En effet, la météo annoncée n’est guère encourageante : la probabilité de pluies orageuses est très forte. Elle ne devrait guère nous laisser que deux heures de répit.
Nous atteignons cependant le sinistre centre pénitentiaire sur les hauteurs d’Uzerche sans la moindre goutte. Toujours ça de gagné ! Sur le plateau des Monèdieres, nous progressons dans le brouillard ou plutôt dans ce qui doit être un nuage caressant le plateau. Nous dépassons le centre d’éducation fermé distant d’une dizaine de kilomètres de la prison. Encore sec, toujours ça de gagné ! Mais que de prisons dans un paysage ou l’horizon se découvre de toute part lorsque les nuages prennent de la hauteur.
À Chamberet (19) nous finissons par nous extraire des nuages. Contre toute attente, le soleil brille. Parfait pour affronter les belles collines des Monèdieres.
Vers la mi-journée, après un parcours riche en sinuosités, rampes et déclivités, en forêt ou sur des routes bordées de magnifiques alignements de chênes séculaires, nous trouvons une prairie idéale pour un pique-nique. Repus, un petit roupillon réparateur s’impose d’autant que la douce chaleur des rayons perçants les nuages devrait faciliter le début de la digestion. Nous sommes quelque-part au point de rencontre de trois départements : Corrèze, Haute-Vienne, Creuse, autant dire au centre du monde tel que le définissait pudiquement Dali.
À Faux la Montagne (23), dans l’ambiance amicale d’un bar associatif, une charmante dame nous sert un excellent café dans des tasses en porcelaine fine, devant la fontaine du village dont elle nous vante la fraîcheur de l’eau.
Nous sommes en Creuse, terre d’élection de quelques personnes en rupture avec le système et en besoin d’authenticité. Avec les paysans et quelques artisans, ils contribuent à éviter que ces endroits perdus ne meurent définitivement.
À Faux-en-Montagne (23) comme sur les rives du lac de Vassivière, il ne pleut toujours pas. Alors on continue, en avalant encore quelques bosses dans un décor champêtre, où paissent ça et là des troupeaux de blondes d’Aquitaine et quelques taureaux charnus.
Sous le soleil perçant les nuages, nous parcourons les deux dernières dizaines de kilomètres sur des routes luisantes de la dernière averse.
Arrivés à Ahun, comme nous n’avons pas eu l’opportunité de revêtir nos élégants sacs poubelle et faute d’avoir été arrosés, nous convenons qu’il est grand temps d’arroser.
Pour nous, Patron, ce sera deux demis !